Caméra embarquée : pourquoi en installer une dans sa voiture ?
De plus en plus d’automobilistes installent une caméra embarquée (ou dashcam) dans leur voiture dans le but d’éclairer les autorités et les assureurs sur leur responsabilité en cas d’accident. Toutefois, cette pratique est encore peu encadrée par le droit français. Explications.

Comment fonctionne une caméra embarquée ?
Comme son nom l’indique, une caméra embarquée, ou dashcam, est un dispositif d’enregistrement vidéo que l’on installe dans une voiture, un camion, voire sur un deux-roues. Cette caméra est généralement positionnée sur le tableau de bord, le haut du pare-brise avant, derrière le rétroviseur central ou à côté des phares sur une moto ou un scooter.
Les systèmes les plus simples ne filment que ce qu’il se passe à l’avant du véhicule alors que les plus performants, dotés de plusieurs optiques, prennent également des images de ce qu’il se passe sur les côtés et à l’arrière du véhicule.
Les dashcams filment en permanence lorsque le véhicule se déplace et stockent les images sur une carte mémoire interne. En fonction de la gamme du produit et de ses fonctionnalités, le prix de ces appareils peut varier de 30 € à plus de 500 €.
Pourquoi utiliser un tel dispositif ?
Le plus souvent, les personnes qui décident d’installer une caméra embarquée dans leur véhicule le font dans l’espoir que les vidéos ainsi réalisées leur permettront :
- de démontrer qu’elles ne sont pas responsables d’un accident dans lequel elles sont impliquées ;
- de prouver qu’elles n’ont pas commis l’infraction pour laquelle elles sont poursuivies (feu rouge grillé, chevauchement d’une ligne continue…) ;
- d’identifier un automobiliste commettant un délit de fuite. Sur ce point, on peut préciser que certaines caméras se déclenchent automatiquement en cas de choc lorsque la voiture est stationnée. Une option intéressante pour identifier l’auteur d’un enfoncement ou d’une éraflure lorsqu’il oublie de laisser sa carte de visite.
L’usage des caméras embarquées est-il autorisé ?
Pour le moment, le droit français n'apporte pas d'éclairage spécifique sur les caméras embarquées dans les véhicules. On pourrait en conclure, hâtivement, que leur usage est parfaitement libre et que les images captées et stockées via ces systèmes le sont également. En réalité, la situation est juridiquement plus complexe dans la mesure où l’utilisation des images et vidéos prises par les dashcams (qui filment les gens sans leur accord) est, quant à elle, très encadrée par différents textes qui protègent notre vie privée.
L’utilisation des images (photos et vidéo) des personnes
« Chacun a droit au respect de sa vie privée », précise l’article 9 du Code civil. En vertu de cette règle, nous bénéficions d’un droit à l’image selon lequel toute reproduction de notre image et sa diffusion sur n’importe quel support (livre, journal, site internet…) ne peut, en principe, se faire qu’avec notre autorisation. Les images de personnes enregistrées par une caméra embarquée ne peuvent donc, par exemple, être diffusées sur des réseaux sociaux, ou sur n’importe quel autre support public, sans prendre la précaution de flouter les visages.
La collecte et le stockage des images des personnes
Collecter et stocker des images de personnes ou toute information permettant de les identifier (une plaque d’immatriculation, par exemple) revient à se constituer une base de données à caractère personnel. Ce type de traitement est encadré par le règlement général sur la protection des données (RGPD) dont la Commission nationale informatique et libertés (CNIL) veille à la bonne application en France.
En principe, les fichiers de données à caractère personnel constitués par des particuliers à des fins privées échappent à cette réglementation. Cependant, la réglementation applicable aux dashcams est encore très vague et c’est pourquoi un avis de la Cnil sur l’usage des dashcams au regard du RGPD est très attendu.
Un enregistrement peut-il servir de preuve ?
A la suite d’un sinistre, être en mesure de présenter les circonstances d’un accident afin de définir les responsabilités des personnes impliquées est un des principaux buts poursuivis par les utilisateurs de dashcams. Se pose alors la question de l’admission de ces vidéos par la justice.
En matière civile, c’est-à-dire lorsque la justice est saisie pour régler un conflit entre des personnes (qui est responsable de l’accident et qui doit ainsi prendre en charge les dégâts ? par exemple), les preuves doivent être recueillies loyalement. Concrètement, si le moyen mis en œuvre pour recueillir ces preuves est illégal (et donc déloyal), la preuve sera irrecevable. Par le passé, les juges ont déjà rejeté des conversations téléphoniques enregistrées à l’insu des personnes, par exemple. Rien ne dit qu’ils n’adopteront pas la même approche avec un enregistrement vidéo réalisé discrètement par une caméra embarquée.
En revanche, en matière pénale, c’est-à-dire lorsque la société poursuit un individu qui a violé la loi (identifier l’auteur d’un délit de fuite pour le sanctionner, par exemple), les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve, y compris, donc, via une vidéo prise par une dashcam, sous réserve que la réglementation se prononce sur la légalité de cette pratique. Il restera ensuite au juge de se prononcer sur la valeur probante de la vidéo.
Par contre, il faut savoir que l'utilisation des caméras embarquées est interdite dans certains pays notamment au Luxembourg ou encore en Autriche, où l'usage des images est alors pénalement répréhensible. Dans d'autres pays, par contre, notamment dans certains pays asiatiques ou en Russie, les dashcams sont imposées par les assureurs qui y voient une solution pour réduire considérablement la sinistralité automobile, qui y est très importante. En France, l'utilisation d'une caméra embarquée est un sujet qui attend encore de nombreux réponses de la part de la réglementation et notamment de la Cnil.